Des conditions de vente et de transport illégales empêchent les passagers aériens de faire valoir leurs droits
La clause dite "de Tiers" empêche les passagers concernés de solliciter une aide juridique pour faire valoir leurs droits et demander une indemnisation.
L'attention publique se tourne actuellement vers le nombre élevé de remboursements que les compagnies aériennes sont obligées de verser à leurs clients en raison du volume considérable de vols annulés cette année. Cela ne signifie toutefois pas que toutes les autres questions juridiques relatives aux compagnies aériennes et aux droits des passagers n'ont soudainement plus aucune importance. Au cours de ces quelques dernières années, le nombre de vols, de passagers et de retards de vols n'a cessé d'augmenter. Toutefois, malgré cette hausse, seuls 14 % des passagers savent qu'ils ont droit à une indemnisation de la part de la compagnie aérienne en cas de retard de plus de trois heures, à condition que cette dernière soit responsable de ce retard. "Au fil des ans, les compagnies aériennes ont élaboré des stratégies complexes afin d'éviter de verser une indemnisation à cette part de passagers qui tente de faire valoir ses droits. Elles revendiquent simplement que le retard a été causé par une circonstance extraordinaire, comme de mauvaises conditions météorologiques, auquel cas la compagnie aérienne ne serait pas tenue d'indemniser ses passagers. D'autres tactiques consistent tout bonnement à ignorer les courriels des passagers ou à en retarder les réponses pendant des mois dans l'espoir que le passager se lasse et ne les contacte plus. L'une de leurs principales astuces consiste à empêcher les passagers de faire valoir leurs droits avec l'aide de tiers, y compris des experts juridiques. Ces compagnies aériennes ne traiteront que les réclamations déposées directement par les passagers concernés. Dans un contexte juridique, cette pratique est très douteuse", affirme Tom van Bokhoven, PDG de Vol-Retardé.fr, spécialiste des droits des passagers aériens.
Les réclamations faites par des tiers ne sont pas traitées par les compagnies aériennes
Selon les conditions générales de vente et de transport de plusieurs compagnies aériennes européennes ou non, comme Emirates ou British Airways, les passagers doivent déposer une réclamation directement auprès de la compagnie aérienne et attendre un délai déterminé, généralement entre 28 et 30 jours, pour obtenir une réponse.
Ce n'est qu'une fois ce délai écoulé qu'ils sont autorisés à faire valoir leurs droits avec l'aide d'un expert juridique ou de toute autre tierce partie. Si un tiers dépose une réclamation directement auprès d'une compagnie aérienne appliquant cette clause, sans que le passager le fasse lui-même au préalable, la compagnie aérienne ne traitera pas la réclamation. "Cette pratique a pour but de forcer les passagers à agir seul , sans assistance, et d'interdire aux représentants autorisés d'agir au nom des consommateurs concernés", explique Tom van Bokhoven de Vol-Retardé.fr. Selon les données à la disposition du spécialiste des droits des passagers, easyJet, Vueling et Ryanair, entre autres, utilisent cette tactique notamment pour contourner les droits de leurs passagers.
Le client est juridiquement en droit de faire appel à un tiers
L'utilisation de cette clause par Ryanair dans ses conditions générales de vente et de transport est particulièrement douteuse, la compagnie ayant été rappelée à l'ordre par un tribunal dans le passé pour avoir utilisé cette tactique. "Ryanair déclare dans ses conditions générales que les réclamations déposées par des tiers ne seront examinées que si le passager concerné a déposé une réclamation personnelle au préalable. Au cours de précédentes procédures judiciaires , la compagnie aérienne a été condamnée pour avoir utilisé cette clause dont le seul but est de limiter les droits des passagers", déclare M. van Bokhoven. Au cours de l'année écoulée, les tribunaux néerlandais et allemands ont donné raison aux passagers lors de nombreux jugements. Ces verdicts stipulent qu'il n'appartient pas à la compagnie aérienne de déterminer si le droit du consommateur à être représenté doit être restreint. En pratique, le passager est en droit de se faire représenter par un tiers. Ce droit ne peut être exclu ou ignoré en aucune façon. Les compagnies aériennes ne sont donc pas autorisées à inclure une clause selon laquelle une réclamation déposée par un tiers ne sera pas traitée si la réclamation n'a pas d’abord été déposée par le passager.
Aucune modification des conditions générales de vente et de transport
Malgré les nombreux jugements rendus sur cette affaire, de nombreuses compagnies aériennes n'ont toujours pas modifié leurs conditions générales. Les données fournies par Vol-Retardé.fr indiquent qu'au moins cinq compagnies aériennes européennes et plusieurs compagnies internationales ont encore recours à cette clause. "Nous avons directement contacté les autorités de protection des droits des consommateurs ainsi que plusieurs compagnies aériennes pour faire la lumière sur cette affaire et les forcer à modifier leurs conditions. Malheureusement, la plupart d'entre elles n'ont pas donné suite", constate M. van Bokhoven. Wizz Air est la seule compagnie aérienne à avoir coopéré et a de ce fait modifié ses conditions générales. Cet amendement a cependant brouillé la clause en question, au lieu de reconnaître entièrement le droit applicable. La plupart des autres compagnies aériennes n'ont cependant pas du tout modifié leurs conditions générales. Le spécialiste des droits des passagers aériens a rappelé, dans une lettre officielle adressée à plusieurs compagnies aériennes, dont British Airways, que les passagers ont juridiquement le droit d'être représentés par un tiers de leur choix et qu’elle devrait par conséquent modifier ses conditions générales. Malgré la clarté de la situation juridique, la compagnie aérienne ne s'est pas pliée aux exigences formulées par Vol-Retardé.fr. Elle risque donc de se voir infliger des amendes substantielles si les autorités compétentes et les groupes d'intérêt décident de prendre des mesures de grande envergure à ce sujet et d'interdire l'utilisation de ces clauses.
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